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Des salariées afghanes d’Action contre la Faim témoignent
Alors que nous célébrons la journée internationale des droits des femmes, leur espace d’expression se réduit drastiquement partout dans le monde. Des salariées afghanes d’Action contre la Faim partagent leurs témoignages dans un contexte de plus en plus restrictif pour les droits des femmes.
Télécharger le kit de mobilisationMédecins, infirmières, ingénieures et psychologues… depuis l’ouverture du bureau d’Action contre la Faim en Afghanistan en 1995, les femmes afghanes participent activement à la lutte contre la faim et à la reconstruction de leur pays. Actuellement, Action contre la Faim emploie plus de 450 personnes en Afghanistan, dont 34% de femmes.
Depuis la prise de pouvoir des talibans en août 2021, les afghanes sont de plus en plus exclues de la sphère publique et de la société. Après l’éducation secondaire le 23 mars 2022, les autorités ont annoncé le 20 décembre dernier l’interdiction d’accès des femmes à l’université, à la fois pour les professeures et pour les étudiantes. Quelques jours plus tard, le 24 décembre, ce sont les femmes afghanes travaillant pour les organisations non gouvernementales qui sont visées par une nouvelle interdiction.
L’impossibilité de travailler pour les salariées afghanes des ONG, de se rendre au bureau ou sur le terrain est une violation flagrante de leurs droits sociaux et économiques, et met en danger leur source de revenus qui est souvent le seul de leur famille. Cela a aussi des conséquences majeures sur la capacité des organisations humanitaires à poursuivre leurs activités et à fournir une aide de qualité et efficace aux femmes qui en ont besoin. En effet, les salariées des ONG sont indispensables pour pouvoir, par exemple, examiner une femme enceinte ou leur porter assistance là où elles en ont besoin.
Une exemption du Ministère de la Santé permet aux femmes de continuer à travailler dans les structures médicales et Action contre la Faim maintient les salaires des femmes qui ne peuvent plus travailler. Cependant, les répercussions sur la sécurité alimentaire des Afghans seront dramatiques dans un pays où 20 millions de personnes sont déjà confrontées à une faim aiguë, dont 6 millions de personnes ne sont qu’à un pas de la famine.
A l’occasion de la journée internationale des droits des femmes, nous portons la paroles de cinq de nos salariées qui font face quotidiennement aux restrictions, qui continuent de se battre et qui nous rappellent que l’espoir est toujours là, malgré tout.
L’éducation, clé pour l’autonomisation des femmes
Le premier jour à l’école marque les esprits et ouvre aux enfants un monde jusque-là inconnu. K.T., devenue psychologue, s’en rappelle très bien : “J’étais si impatiente d’aller à l’école. Je me rappelle le moment quand la professeure est entrée dans la classe, c’était une femme gentille que je n’oublierai jamais. Elle embrassait tous les élèves, quelle que soit leur origine ethnique. J’étais une immigrée afghane en Iran, pays étranger, mais je m’y sentais très bien”. K.T. a toujours gardé la photo de sa première professeure pour se rappeler de ces beaux jours.
La situation économique et géographique peut s’avérer déterminante dans le parcours des enfants. Dans la province de K.J., il n’y avait pas d’école de filles à proximité. C’est pourquoi elle n’a commencé ses études qu’à l’âge adulte: “L’école était un rêve pour moi, c’est pourquoi j’ai toujours étudié avec ardeur et enthousiasme.” Quand sa famille a émigré en Iran, K.J. a réussi à s’intégrer dans la structure scolaire : “J’ai passé un examen pour les cinq années scolaires que j’ai manquées. Puis j’ai obtenu la permission de rejoindre le lycée et de poursuivre mes études.”
Aujourd’hui, N. et sa fille de 4 ans sont inquiètes : “Elle m’a demandé: “Maman, je peux seulement aller à l’école jusqu’à 6 ans ? Et après ça ? Pourquoi mon frère peut y aller et moi non?” Même si j’étais très triste en entendant ses pensées, je lui ai dit de faire de son mieux.”
Quand les femmes ne peuvent plus travailler
Pour K.T et H. les restrictions représentent bien plus qu’une interdiction de travailler. K.T l’explique : “Lorsqu’un patient me dit qu’elle.il voit des résultats en elle.lui et qu’elle.il guérit, à tel point qu’elle.il peut reprendre espoir et vivre sa vie telle qu’elle est, en acceptant que la vie est aussi pleine d’obstacles. Elle.il est capable de surmonter ses difficultés sans faire de mal aux autres ni à elle.lui-même. Ses paroles me motivent et me donnent de l’espoir pour continuer ce que je fais.“
De son côté, H. lutte directement pour les droits des femmes au quotidien : “Je travaille pour défendre les droits humains, en particulier les droits des femmes à recevoir une éducation et je les aide autant que possible. Malheureusement, comme vous le savez, de nos jours, les droits des femmes à travailler et à s’instruire ont été supprimés. C’est une grande préoccupation pour tout le monde et cela nous a tous affectés. J’espère que ce problème pourra être résolu très rapidement afin que les femmes aient à nouveau le droit de travailler et de recevoir une éducation.”
