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© Action contre la Faim

Action contre la Faim intervient contre le choléra à Kwamouth dans le Maï Ndombé

A Kwamouth, dans la province du Maï-Ndombe, au nord de Kinshasa, une épidémie de choléra s’est déclarée plusieurs semaines.

Action contre la Faim (ACF), rare acteur humanitaire dans cette zone où les infrastructures sanitaires sont particulièrement impactées depuis 2023, déploie une réponse d’urgence pour répondre à l’épidémie dont le taux de létalité de 16% fait craindre une dégradation rapide de la situation.

« Nous intervenons depuis mi-2023 à Kwamouth suite au conflit de 2022 et ses conséquences sur les communautés. Nous sommes dans un territoire où les besoins en termes d’accès à la santé, que ça soit au niveau des médicaments, du matériel et du personnel de santé disponibles, sont critiques. En ce qui concerne les médicaments propres au traitement du choléra, ceux-ci sont déjà en rupture de stock dans les centres de santé locaux. » explique Julie Drouet, adjointe directeur pays pour les programmes d’Action contre la Faim en République démocratique du Congo.

Depuis plusieurs semaines une épidémie de choléra, maladie endémique à la RDC, s’est déclarée dans la zone. Cette maladie hydrique se caractérise principalement par de fortes diarrhées aqueuses, accompagnées de vomissements, qui peuvent entraîner une déshydratation rapide et la mort en quelques heures. Les personnes atteintes de malnutrition sont particulièrement à risque. Pourtant, lorsque les patients sont rapidement traités, le rétablissement est prompt grâce à la prise de solutions de réhydrations orales voire des antibiotiques dans les cas les plus graves.

A Kwamouth, 43 cas ont été recensés dont 7 décès¹ ce qui porte le taux de létalité à 16% en moyenne avec des zones de santé atteignant plus de 20%. Des taux extrêmement élevés alors même que l’origine et la propagation des cas ne sont pas encore identifiés. « Notre épidémiologiste est place afin d’analyser la situation. Nous sommes particulièrement inquiets car des cas ont été enregistrés dans l’hôpital général de Kwamouth mais aussi dans les centres de santé en bord de fleuve : avec plusieurs foyers disséminés, le risque est que la propagation soit extrêmement rapide. » ajoute Julie Drouet.

Situé au bord du fleuve Congo, axe fluvial très emprunté pour le transport des personnes et des biens dans une zone où les voies terrestres sont en mauvais état, Kwamouth est à 370 km de la capitale Kinshasa où les trois-quarts des zones de santé de la ville² sont également touchées par le choléra, suite aux récentes inondations. En face, le Congo-Brazzaville, avec qui les échanges commerciaux et les mouvements individuels sont nombreux, ce qui accentue les risques de propagation transfrontalière.

Prévenir et traiter le choléra : notre équipe d’urgence se rend sur place

Sur le territoire, Action contre la Faim soutient 15 centres de santé ainsi que l’hôpital général de Kwamouth et sa clinique mobile couvre 8 sites. Pour renforcer ce soutien auprès des structures de santé face à l’épidémie de choléra, les équipes d’ACF ont commencé à fournir des médicaments – dont les solutions de réhydratation orale – à l’hôpital de Kwamouth et dépêché une équipe d’urgence pour prévenir les risques liés à la maladie et sa propagation, avec le support de l’Agence suédoise de coopération internationale pour le développement (SIDA).

Il s’agit de former les agents de santé et les relais communautaires sur l’identification de la maladie, la sensibilisation aux bonnes pratiques d’hygiène, l’information aux populations mais aussi l’utilisation des équipements de protection individuelle et les mesures de prévention et de contrôle des infections dans les centres de santé.

En parallèle de ces mesures de renforcement de capacités des personnels de santé, les équipes vont mener des actions de désinfection des ménages pour les cas dont l’origine aura été identifiée.

L’épidémiologiste d’Action contre la Faim RDC fait également partie du personnel déployé. Ces dernières années, les équipes d’Action contre la Faim dans le pays ont développé une forte expérience dans la riposte contre les épidémies de rougeole, choléra, Mpox, ebola, marbourg et anthrax ; notamment sur les analyses des données sanitaires en vue d’identifier, de surveiller et de maîtriser les épidémies et le suivi des tendances épidémiologiques pour anticiper les évolutions. Action contre la Faim appuie au renforcement des capacités des partenaires en matière de prévention des épidémies, et fournit un accompagnement technique dans la mise en œuvre des stratégies adaptées aux contextes épidémiques.

A Kwamouth, le conflit et les déplacements font le lit de la malnutrition dans un contexte de financement incertain

« Il faut savoir que suite au conflit, seulement 40% des aires de santé sont fonctionnelles, il est difficile pour les populations d’avoir accès aux soins et il y a très peu d’acteurs présents » ajoute Julie Drouet.

Effectivement, le territoire de Kwamouth et sa cité éponyme sont en proie à un conflit intercommunautaire depuis juillet 2022 qui a déplacé plus de 220 000 personnes³ impactant également les provinces voisines. Les violences ont entraîné la dégradation ou la destruction de centres de santé, une augmentation des prix des denrées alimentaires dans cette zone majoritairement agricole qui fournissait en partie Kinshasa et une hausse des cas de malnutrition aiguë chez les enfants de moins de cinq ans.

Nos enquêtes nutritionnelles ont démontré des taux de malnutrition alarmants ; 15,3% de prévalence de la malnutrition aiguë globale et 2,8% pour la malnutrition aiguë sévère (MAS).

« En 2024 nous avons pris en charge 2940 enfants atteints de MAS et traités plus de 25 000 enfants pour des maladies infantiles dans 16 structures de santé du territoire de Kwamouth. Mais ces chiffres ne reflètent qu’une partie de la réalité, souligne Julie Drouet. Comme nous intervenons depuis seulement deux ans auprès des communautés pour soigner les enfants atteints de malnutrition aiguë sévère, la confiance s’installe peu à peu et l’information commence à être connue dans les communautés que leurs enfants peuvent être traités gratuitement. Dans certaines zones, lorsque nous faisons du dépistage, on trouve jusqu’à 6% d’enfants qui souffrent de malnutrition aigüe sévère, ce qui nous fait penser que les prises en charge ne vont faire qu’augmenter au fil du temps et que les gens ont plus que jamais besoin de soutien que ça soit pour la santé ou la lutte contre le choléra. »

Cette prise en charge en santé et nutrition a été rendue possible grâce à un financement du bailleur de fond américain US Department of States (anciennement BHA/USAID) lequel a été affecté par les décrets de l’administration américaine de janvier. Si les activités ont pu reprendre, le futur de la réponse humanitaire en RDC reste incertain dans un contexte global de baisse des financements de la solidarité internationale et particulièrement dans le territoire de Kwamouth qui peine à visibiliser ses besoins pourtant criants.

 


[1] En date du 24/07/2025

[2] Choléra : recrudescence de cas à Kinshasa en RDC – Priorité santé

[3] Besoins Humanitaire et Plan de réponse République démocratique du Congo 2025