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Covid-19 crise alimentaire Pakistan © Eduardo Diaz pour
Action contre la Faim

À la Une

Coronavirus

Le Covid-19 pourrait provoquer l’effondrement du système alimentaire au Pakistan

 

Dans cette interview, Jennifer Ankrom explique les défis et les enjeux que suppose l’application des mesures de lutte et de prévention contre le virus dans un pays comme le Pakistan, dont l’économie repose en grande partie sur l’agriculture. Elle exprime l’inquiétude de l’organisation face aux conséquences que cela pourrait avoir auprès des communautés agricoles et alerte sur une possible crise alimentaire du pays qui aurait des conséquences désastreuses pour le Pakistan et les pays voisins.

« Au Pakistan, la population était déjà fortement exposée et vulnérable à la faim. Selon une étude à l’échelle nationale, 37% de la population était en situation d’insécurité alimentaire en 2018.

Nous travaillons dans les zones rurales de la région du Sindh, où vivent 48 millions de personnes. C’est la deuxième province productrice de denrées alimentaires du pays et le point d’entrée pour la plupart des importations. Mais il s’agit également d’une région où 46% des enfants ont un retard de croissance et 23% souffrent d’émaciation (NNS 2018).

Dans ce contexte fragile, les efforts visant à limiter la propagation du virus à travers la mise en place de mesures de confinement peuvent avoir des conséquences immédiates et à long terme sur le plan socio-économique, humain et environnemental. Pour l’économie du pays, il faudra alors beaucoup d’efforts et de temps pour s’en remettre » explique Jennifer Ankrom.

 

 

EN QUOI LE COVID-19 MENACE-T-IL LE SYSTEME ALIMENTAIRE DU PAKISTAN ?

 

 

« Il est important de souligner que le risque de propagation du virus dans le pays est très élevé. Jusqu’à présent, nous avons recensé 9565 cas confirmés au Pakistan. Cela est dû en partie au fait que dans les villes, nous rencontrons des problèmes liés à l’assainissement, un manque général de connaissances sur la façon de traiter les symptômes et sur la manière d’adopter des mesures barrières telles que le lavage des mains, le port du masque et la distanciation sociale.

Le gouvernement a donc décidé de mettre en place un confinement, Mais une exception a été faite pour la majeur partie des agriculteurs se trouvant en zone rurale pour qu’ils puissent continuer leur activité car le pays est en pleine récolte et beaucoup d’agriculteur n’ont d’autres choix que de travailler chaque jour pour subvenir à leurs besoins. Mais cela ne sera pas suffisant pour éviter la crise agricole qui se profile dans les zones rurales car avec le confinement, les transports de marchandises sont fortement réduits, les marchés moins accessibles et les petits producteurs peinent à vendre leurs produits entrainant des gaspillages de stocks et la chute des prix. » alerte la directrice d’Action contre la Faim au Pakistan.

« Par ailleurs, le risque de propagation du virus demeure réel car pour réaliser les récoltes, les agriculteurs coopèrent souvent entre eux et une entraide se fait entre les villages faisant parfois appel à une main d’œuvre extérieure supplémentaire.  Ces échanges renforcent le risque de circulation du virus dans des zones  rurales, où aucun dépistage n’est réellement disponible et où les agriculteurs avec leurs faibles revenus n’ont pas les moyens de se déplacer vers les centres de dépistage qui sont dans les villes » prévient la directrice.

 

 

"Il est urgent de soutenir les communautés agricoles et de trouver un juste équilibre entre santé et sécurité alimentaire. "
Jennifer Ankrom
Directrice d'Action contre la Faim, Pakistan

« En plus, les ONG doivent exercer un plaidoyer au niveau mondial et sonner l’alarme sur le lien indéniable entre la sécurité alimentaire et la pandémie de Covid-19 dans de nombreux pays en développement. » insiste Jennifer Ankrom.

« Il faut tenir compte de la complexité de la chaîne de production. Si rien n’est fait, nous pourrions assister à un effondrement des systèmes agricoles et de distribution alimentaire ainsi qu’une explosion du chômage à l’échelle du pays. En effet, avec les mesures de confinement une grande partie de la population est plongée dans la précarité. Les commercants, les employés de petites entreprises ou les chauffeurs de bus n’ont aujourd’hui plus de revenus. Par ailleurs, si le système agricole pakistanais s’effondre, les conséquences seront fortes aussi au niveau régional car  le pays exporte beaucoup de marchandise vers les pays voisins et notamment l’Afghanistan. Avec la propagation du COVID-19 nous risquons donc d’avoir une crise alimentaire régionale, affectant des millions de personnes. » alerte Jennifer Ankrom.

 

 

QUELS SONT LES ENJEUX DE LA LUTTE CONTRE LE COVID ET LA LUTTE CONTRE LA FAIM AU PAKISTAN ?

 

 

Pour lutter efficacement contre la pandémie de Covid-19 au Pakistan il faut conjuguer à la fois lutte contre le virus et lutte contre la faim en prenant en compte la complexité du système agricole pakistanais. Les blocages et les restrictions de mouvement doivent être accompagnés de mesures visant à garantir que les besoins essentiels soient couverts. Dans les zones rurales, nous agissons avec des partenaires locaux et des dirigeants communautaires pour transmettre des messages sur la manière de s’adapter à la situation, fournir des matériaux et des équipements adéquats, sensibiliser aux règles d’hygiène et aux gestes barrière pour sensibiliser les communautés et réduire les risques de contamination.

Lorsque les agriculteurs se déplacent pour les récoltes, ils doivent être informés de la manière dont ils pourraient s’organiser au sein de leur village plutôt que de faire appel à une main d’œuvre extérieure pour éviter la propagation du virus entre les communautés» précise Jennifer Ankrom.

"Trouver un terrain d'entente est notre priorité, car il existe un lien clair entre une crise alimentaire et la pandémie de Covid-19. "
Jennifer Ankrom
Directrice d'Action contre la Faim, Pakistan

Pour éviter que le système agricole ne s’effondre la directrice d’Action contre la Faim au Pakistan prévoient des mesures préventives et de protection des communautés agricoles pour leur permettre de continuer à travailler et subvenir à leurs besoins en toute sécurité.

« Après les récoltes un système de transport sécurisé devra être mis en place pour les agriculteurs puissent transporter le matériel et les semences entre les villages pour réensemencer leurs champs. Il faudra également s’assuré que les chauffeurs respectent et appliquent les mesures de sécurité et de distanciation sociale.  La santé publique doit être la priorité absolue, il est donc urgent d’étendre le dépistage et les traitements dans les zones rurales. Le ramadan ayant lieu à la fin du mois d’avril il est essentiel que du matériel de protection soit disponible pour tous. Il permettrait à ceux qui présent des symptômes légers de s’isoler et de protéger leur entourage.

L’une de nos principales priorités est également de maintenir les programmes de traitement nutritionnel en cours. Les risques de ne pas suivre un traitement nutritionnel peuvent entraîner des conséquences désastreuses, en particulier pour les populations les plus vulnérables. » conclut Jennifer Ankrom.  

 

Pour rappel en 2018, près de, 45 % des enfants souffrent d’un retard de croissance causé par la sous-nutrition au Pakistan. La même année nos programmes ont pu soutenir 334 588 personnes à travers le pays.

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