• Territoire Palestinien Occupé

Communiqué de presse

© Action contre la Faim

Les sites d’Action contre la Faim pour le traitement de la malnutrition menacés en raison des ordres de déplacement et des incursions militaires à Gaza-ville

Paris/Jérusalem, le 10 septembre 2025. L’incursion militaire prévue à Gaza-ville menace d’avoir des conséquences dévastatrices pour une population déjà affaiblie par la faim, les pertes et les déplacements répétés.

Les familles font face à un choix impossible : un déplacement permanent avec peu ou pas de perspectives de retour ; ou la mort, des blessures graves, la maladie et la famine si elles restent. Le fait de pousser des centaines de milliers de personnes plus au sud dans de telles conditions risque de constituer un transfert forcé, une grave violation du droit international.

« Ce que nous voyons à Gaza-ville n’est pas seulement une crise, c’est un effondrement de la survie humaine », déclare Natalia Anguera, responsable des opérations pour le Moyen-Orient chez Action contre la Faim. « Les familles ont faim, sont épuisées, en deuil, et ne conçoivent pas de devoir déplacer leurs enfants – certains pour la vingt-sixième fois en moins de deux ans. Malgré les efforts acharnés de nos équipes, elles font elles aussi face à cet effondrement. » Le coût humain de cette incursion sera écrasant. Les équipes d’Action contre la Faim sont une fois de plus confrontées à leur propre déplacement, tout en risquant de perdre l’accès à des zones critiques où les réseaux d’eau, les distributions alimentaires et les services de nutrition sont encore actifs. Les organisations humanitaires ne peuvent être instrumentalisées pour servir de moyens au transfert forcé : Action contre la Faim s’engage à accompagner les communautés où qu’elles se trouvent. En outre, les opérations humanitaires ne doivent pas devenir un moteur de déplacement – déplacer de force les services hors de lieux comme Gaza-ville risque de créer des conditions poussant les populations à fuir par absence d’alternative.

Les dépistages nutritionnels et les traitements pour les enfants malnutris ainsi que les femmes enceintes et allaitantes d’Action contre la Faim pourraient être interrompus dans les zones à haut risque de malnutrition. L’organisation a mis sur pied plus de 6 points de prise en charge communautaire de la malnutrition aiguë à Gaza-ville et a traité des centaines d’enfants et de nourrissons souffrant de malnutrition aiguë et sévère, avec trois espaces d’accueil pour les mères et les bébés. Rien qu’en juillet et août, les équipes nutrition d’Action contre la Faim ont reçu plus de 400 cas d’enfants malnutris, dont 20 % dans un état sévère.

Les activités essentielles comme la distribution d’eau par camion et la réhabilitation des infrastructures sanitaires sont menacées en raison des bombardements en cours, des opérations terrestres et des ordres de déplacement. À Gaza-ville, la disponibilité de l’eau a chuté de 70 %, en raison des pénuries de carburant et des dommages aux infrastructures, obligeant le recours à l’approvisionnement en eau potable par camions-citernes, ce qui ne devrait être qu’une solution temporaire. De nombreuses familles n’ont pas les moyens de collecter ou de stocker l’eau limitée qui leur est livrée, et l’accès des camions peut être entravé par les activités militaires. Sans la restauration des infrastructures d’eau et d’assainissement de Gaza, les communautés restent gravement exposées à la famine et aux maladies.

Au moins 86 % de la bande de Gaza est déjà soumise à des ordres de déplacement ou se trouve en zone militarisée. Dans ces zones, comme dans celles qui ne sont pas officiellement soumises à ces ordres, les infrastructures endommagées et la surpopulation rendent l’accès à l’eau, à la nourriture, à un abri et aux soins médicaux extrêmement difficile.

« Il est difficile d’imaginer près d’un million de personnes revenant vers le sud. Je ne sais pas comment le démontrer. Il n’y a plus d’abris. Il n’y a ni tentes, ni bâches. Les gens construisent des abris avec rien », déclare un membre du personnel d’Action contre la Faim à Gaza.

Même dans ces circonstances alarmantes, « Action contre la Faim réaffirme encore une fois son engagement à servir les populations là où elles se trouvent. Nous resterons présents à Gaza-ville pour fournir une aide vitale aussi longtemps que nous le pourrons », ajoute Natalia Anguera.

Action contre la Faim réitère son appel à un cessez-le-feu permanent, à la libération inconditionnelle de tous les otages et détenus, et à un accès humanitaire complet, à grande échelle et durable pour les acteurs humanitaires. Nous rappelons également à toutes les parties au conflit que toute évacuation doit être temporaire et que les familles doivent pouvoir retourner chez elles lorsque les hostilités cessent. Toutes les populations déplacées doivent pouvoir accéder de manière sûre et digne à un abri, à de l’eau, de la nourriture et des soins de santé.

« Le transfert forcé constitue une grave violation du droit international. Nous exhortons toutes les parties au conflit à respecter le droit international humanitaire et à garantir un accès sécurisé au personnel et aux fournitures humanitaires », conclut Natalia Anguera.