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Communiqué de presse

chad 2024
© Christophe Da Silva pour Action contre la Faim

La faim recule sur le papier, pas sur le terrain… En 2024, les zones de conflit en première ligne de la crise

Le rapport mondial sur l’insécurité alimentaire (SOFI) publié par cinq agences des Nations Unies, présente les données pour l’année 2024. Il fait état d’une légère baisse du nombre de personnes souffrant de la faim dans le monde par rapport à l’année dernière, avec 673 millions de personnes sous-alimentées (soit 8,2 % de la population mondiale).

Cette apparente amélioration masque une réalité bien plus préoccupante dans certaines régions, l’Afrique notamment, et certaines zones de conflit comme c’est le cas à Gaza où une famine de masse se propage. 

Par ailleurs, le rapport qui porte sur les données 2024 n’évoque pas les coupes drastiques dont l’aide internationale fait l’objet et qui ne manqueront pas de marquer un vrai recul pour la réalisation du droit à l’alimentation en 2025. 

Les épicentres d’une crise qui s’aggrave

« Ce que révèle ce rapport, c’est une injustice criante : pendant que certains pays enregistrent des avancées, d’autres s’enfoncent dans la faim. Nous ne pouvons pas parler de progrès tant que des millions de vies sont laissées pour compte. La faim n’est pas une fatalité, c’est une conséquence directe de choix politiques » déclare Perrine Benoist, Co-Directrice Générale d’Action contre la Faim. 

Le continent africain concentre désormais près de la moitié des personnes souffrant de la faim dans le monde, et les projections indiquent qu’il en abritera 60 % d’ici 2030.

Selon les chiffres IPC¹ qui sont complémentaires du rapport SOFI, cent pour cent de la population de la bande de Gaza était confrontée à des niveaux élevés d’insécurité alimentaire aiguë, tout comme plus de la moitié des habitants du Soudan du Sud et du Soudan, ainsi que près de la moitié de la population du Yémen.

En République démocratique du Congo (RDC), où Action contre la Faim est présente depuis 1997, la situation nutritionnelle atteint un niveau critique. L’intensification des conflits armés combinée à la crise structurelle à l’Ouest aggrave l’insécurité alimentaire, plongeant plus de 27,7 millions de personnes dans une situation d’insécurité alimentaire grave (phase 3 et plus de l’IPC), dont 3,9 millions en situation d’urgence alimentaire (phase 4)². Le rapport SOFI 2025 confirme cette tendance alarmante, soulignant une prévalence de la sous-nutrition parmi les plus élevées au monde.

D’un point de vue global, les niveaux de faim restent nettement supérieurs à ceux d’avant la pandémie et bien au-delà des niveaux de 2015, année où les objectifs de développement durable (ODD) ont été adoptés. En 2024, 96 millions de personnes de plus souffrent de la faim par rapport à cette date de référence.

Chiffres clés du rapport SOFI 2025

Des coupes budgétaires massives, encore invisibles dans les chiffres du rapport SOFI

Les données du rapport SOFI s’arrêtent à 2024, mais elles ne disent rien de la tempête humanitaire qui se profile. En 2025, les financements internationaux se sont effondrés alors que les besoins alimentaires explosent. USAID est démantelé, en France la baisse de l’aide publique au développement est évaluée à -52 % en 2026 par rapport à 2024, et des baisses drastiques sont en cours dans toute l’Europe du Nord.

« Ces chiffres sont déjà alarmants, mais le pire est peut-être encore à venir. Les coupes dans l’aide internationale vont frapper de plein fouet les populations les plus vulnérables. C’est une décision politique, et elle a un coût humain immense. », alerte Perrine Benoist, Co-Directrice Générale d’Action contre la Faim.  

Le coût humain est désormais chiffré, selon une étude publiée dans The Lancet en juillet 2025, les coupes budgétaires américaines pourraient entraîner jusqu’à 14 millions de décès supplémentaires d’ici à 2030 dont 4,5 millions d’enfants de moins de 5 ans. Ces décès seraient en grande partie liés à la dégradation de l’accès à la nutrition, aux soins de santé et à la protection sociale dans les pays les plus vulnérables.

Le poids de l’inflation sur l’insécurité alimentaire

Le rapport SOFI met également en lumière l’inflation persistante des prix alimentaires, qui dépasse l’inflation générale depuis 2020. En janvier 2023, l’inflation alimentaire mondiale a atteint 13,6 %, contre 8,5 % pour l’inflation globale. Cette pression sur les prix rend l’accès à une alimentation saine encore plus difficile, en particulier pour les populations les plus vulnérables.

Comme responsable de cette inflation, le rapport SOFI évoque deux chocs majeurs : la pandémie COVID-19 et la guerre en Ukraine. Le rapport reste très discret sur l’impact de la crise climatique sur cette même inflation et ignore complètement le rôle joué par certains acteurs internationaux sur la spéculation des denrées alimentaires. Ce mécanisme joue pourtant un rôle majeur dans la crise des prix alimentaires. 

 « Les aliments ne sont pas des biens marchands comme les autres : manger est un droit humain fondamental. Il est essentiel de réguler le marché international des denrées alimentaires pour permettre la pleine réalisation du droit à l’alimentation et à la nutrition ! » précise Perrine Benoist, Co-Directrice Générale d’Action contre la Faim.  


[1] Integrated Food Security Phase Classification

[2] Democratic Republic of the Congo: Acute Food Insecurity Projection Update for January – June 2025 | IPC – Integrated Food Security Phase Classification