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À la Une
Nour, Responsable des ressources humaines pour Action contre la Faim au Liban, dans la base de Tyr, s’est mariée le jour même où le conflit a commencé. Nour est une travailleuse humanitaire qui continue à soutenir les personnes touchées par les hostilités, bien qu’elle fasse elle-même partie des 1 200 000 personnes déplacées à l’intérieur du pays du fait des attaques et des ordres d’évacuation.
Avec ses propres mots, elle raconte comment sa nouvelle maison, située dans une des zones rouges du Sud-Liban, a été détruite par une frappe israélienne au cours des dernières semaines.
« Je m’appelle Nour. J’ai emménagé dans ma maison le 8 octobre 2023, le jour de mon mariage mais aussi le jour où la crise a commencé au Liban. J’ai officiellement emménagé après mon retour de lune de miel, le 21 octobre 2023. J’ai toujours aimé cette maison, et pendant des années, mon mari (qui était alors mon fiancé) et moi l’avons aménagée ensemble, étape par étape. Chaque mois, nous mettions de côté une partie de nos salaires pour faire en sorte que chaque recoin de la maison soit comme nous le souhaitions. C’était un endroit magnifique, chaleureux et réconfortant où je me sentais toujours en sécurité. Une fois la maison entièrement prête, nous ne nous sentions jamais vraiment en sécurité car la situation était instable. Nous craignions constamment qu’une guerre n’éclate, nous forçant à quitter nos maisons. La nouvelle m’a atterrée. J’essaie encore de m’adapter et d’accepter le choc, ce qui est loin d’être facile. Je me demande ce qui se passera quand tout sera terminé ; combien de temps il faudra pour reconstruire ma maison et combien de temps il me faudra pour repartir à zéro. Nous venions de rembourser la dernière tranche de notre prêt hypothécaire à la fin du mois de septembre. Perdre la maison si peu de temps après a été un coup dur. Notre maison se trouvait à Bazourieh, dans le district de Tyr.
Pendant la crise, je travaillais dans la maison que nous avions louée après avoir dû quitter la nôtre. Mon mari est rentré et il m’a dit qu’il y avait eu une frappe à Bazourieh. Mon cœur s’est serré et j’ai eu un terrible pressentiment. J’avais entendu parler d’attaques à Bazourieh, mais cette fois-ci, c’était différent, j’ai pressenti que quelque chose n’allait vraiment pas. Nous ne savions pas exactement où la frappe avait eu lieu, car les gens étaient encore dans le village. Beaucoup avaient déjà fui, et il n’y avait que des volontaires sur place pour déblayer les débris et ouvrir les routes. J’ai continué à travailler un peu, puis je suis partie et j’ai demandé à mon mari en tremblant : « Sais-tu où la frappe a eu lieu ? ». C’est alors que nous avons reçu une vidéo montrant que notre maison avait été touchée. Au début, je n’arrivais pas à y croire jusqu’à ce que je voie la vidéo. « Non, ce n’est pas ma maison. Ce n’est pas réel », me suis-je dit. C’était incroyablement dur. J’ai beaucoup pleuré. C’était un moment dévastateur, mais mon mari a été fort, il nous a constamment encouragés et soutenus. Les maisons de sa sœur et de son frère ont été détruites en même temps que la nôtre. C’était une expérience très difficile, mais je savais à quel point mon mari souffrait intérieurement, d’autant plus qu’il venait de se marier et qu’il avait à peine eu le temps d’en profiter.
Nous avons évacué le 23 septembre, lorsque les hostilités se sont intensifiées dans le sud. Nous nous sommes installés dans une zone située au-dessus d’Awkar, appelée Deek Al-Mahdi, comme beaucoup d’autres personnes qui ont fui. Nous avons loué un appartement et nous nous sommes tenus au courant de l’actualité sur WhatsApp. Nous avons reçu des mises à jour de la part de personnes qui savaient que nous vivions là et de volontaires de la défense civile. Malheureusement, c’est ainsi que nous avons appris que notre maison avait disparu.
En tant que jeune mariée, il y avait tant de choses dans ma maison que je n’avais même pas encore utilisées, des choses que j’aimais beaucoup. Vous savez, quand vous payez parfois un peu plus cher pour une pièce de mobilier spéciale dans votre maison, ou pour une belle parure de chambre à coucher ? J’ai eu l’impression que tout le travail et les efforts déployés pour choisir chaque recoin de cette maison avaient été vains. Bien sûr, il vaut mieux perdre une maison qu’un être cher, mais ce n’est tout de même pas facile. Les objets, les détails, les souvenirs, tout cela a une signification. Cela ne faisait même pas un an que nous vivions là, mais il y avait déjà tant de beaux souvenirs qui faisaient de la maison un espace sûr, et maintenant ils ne sont plus là.
Ma responsable m’a beaucoup soutenue sur le plan émotionnel, en m’invitant à ne pas travailler le lendemain et en m’incitant à prendre le temps de me reposer. Elle m’a dit que je pouvais la contacter si j’avais besoin de quoi que ce soit. Le soutien que j’ai reçu après la perte de ma maison a été très réconfortant, en particulier de la part de personnes dont je ne m’attendais pas à recevoir des nouvelles. C’était touchant parce que nous partageons tous la même douleur, les mêmes difficultés, et nous essayons de nous réconforter les uns les autres puisque nous avons tous perdu quelque chose.
Avant que la maison ne soit détruite, je me disais que je n’accepterais pas l’idée que notre maison puisse être en danger, même si elle était sous les bombardements ou à proximité. Je ne pouvais pas croire que cela nous arriverait. Maintenant que c’est le cas, je repense au passé. En 2006, la maison de mes parents a également été détruite. Après cet événement, je me suis dit que tant que mon mari, ma famille et mes proches sont en sécurité, c’est ce qui compte le plus. Savoir que tout le monde va bien et que je peux entendre leurs voix me réconforte. Les biens matériels peuvent être remplacés, même s’il faut du temps pour les reconstruire. Je suis peut-être une jeune mariée sans maison, mais tant que nous savons que nos proches sont en sécurité, c’est l’essentiel.
Ma principale préoccupation aujourd’hui est la stabilité. Combien de temps vivrons-nous ainsi ? Quand pourrons-nous nous installer à nouveau ? J’espère pouvoir reconstruire une maison encore mieux qu’avant. Je plaisante en disant que je n’aimais pas vraiment les vieilles tuiles de la maison de toute façon, et que peut-être je pourrai en choisir de meilleures la prochaine fois. Je rêve d’un avenir meilleur où je pourrai fonder une famille et lui offrir un environnement stable et sûr, tout en soutenant d’autres personnes se trouvant dans une situation similaire.
Lundi, l’organisation (Action contre la Faim) a décidé que les employés devaient travailler à domicile en raison de l’escalade des hostilités au cours de la nuit. À sept heures du matin, les attaques se poursuivaient. La situation s’est rapidement aggravée. Ce jour-là, j’étais chez mes beaux-parents, qui sont âgés, et je n’étais pas rentrée chez moi pour prendre mes affaires. Nous pensions tous que cela ne durerait qu’une nuit ou deux ; personne ne s’attendait à une telle escalade, à des hostilités de si longue durée et à des frappes sur des habitations civiles. Il était difficile de circuler, même sur les routes ; la circulation était dense car tout le monde fuyait dans la peur. Nous devons beaucoup à ceux qui distribuaient de l’eau sur la route, car il n’y avait pas de magasins ouverts. Cela a facilité notre long voyage en quête d’un endroit sûr. Nous avons fini par passer une nuit chez des membres de la famille de mon mari avant de nous installer dans notre logement actuel à Deek Al-Mahdi.
Ce que nous vivons est loin d’être facile. Nous devons rester unis et nous soutenir mutuellement par tous les moyens possibles. Là où nous nous trouvons, les gens nous ont accueillis à bras ouverts en dépit des différences de religion ou d’origine. Ils nous ont traités avec humanité et nous ont aidés en sachant que nous étions déplacés et en proie à des difficultés émotionnelles. Pendant cette période, nous devons nous serrer les coudes et nous entraider, que nous ayons perdu des maisons ou des êtres chers. Ce qui compte, c’est que nos esprits soient intacts et que nos proches soient en sécurité. Cela vaut plus que tout. J’espère, une fois cette crise terminée, que nous reviendrons plus forts et que nous reconstruirons mieux qu’avant. Après tout, s’accrocher à sa patrie et à sa terre est plus précieux que tout, malgré les sacrifices.
Dans le cadre de mon travail pour Action contre la Faim, je peux témoigner des efforts de l’organisation pour soutenir les personnes déplacées, en particulier dans les écoles et les zones les plus affectées, par le biais de distributions de matelas, d’eau, de paquets alimentaires et de kits d’hygiène. En tant que personne déplacée moi-même, je comprends à quel point ces articles sont essentiels. J’ai la chance d’avoir encore un emploi et d’être payée à la fin du mois, mais d’autres sont dans des situations bien pires et ont encore plus besoin d’aide, notamment de médicaments et de produits de première nécessité. Cette crise m’a montré ce que l’on ressent lorsqu’on est en position de vulnérabilité. Même en tant qu’employée aidant les personnes dans le besoin, je me rends compte que je ne suis pas très différente de ces personnes. Nous sommes maintenant dans la même situation et cela nous aide à mieux comprendre leurs besoins. En tant qu’organisation, cela nous permet de fournir une aide appropriée.
Les gens sont épuisés et tout le monde a besoin de soutien. Depuis 2019, les Libanais n’ont pas eu de répit et nous avons l’impression que les choses ne font qu’empirer. Nous espérons tous une solution qui nous permettra d’aller de l’avant et de rendre le Liban meilleur. Le sud est une partie cruciale du pays et nous avons besoin que la guerre prenne fin, quoi qu’il en coûte ; que les bombardements s’arrêtent et que les civils soient protégés. Il y a des gens qui dorment dans les rues et qui ont besoin d’un abri. Nous espérons que cette crise prendra fin et que nous pourrons reconstruire et prospérer à nouveau, encore mieux qu’avant. »
Liban
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