Deux ans de guerre en Ukraine : la situation humanitaire reste préoccupante

Alors que le conflit en Ukraine entre dans sa troisième année, la guerre continue de dégrader les conditions de vie des civils et d’entraver leur accès à la santé, à l’éducation et à d’autres services de base, en particulier au sud et à l’est de l’Ukraine. Certaines personnes, comme Valentyna, habitante d’Ivanivka, un village dans la région de Kharkiv, ont dû abandonner leurs activités agricoles car les terrains sont minés. D’autres, comme Yuri, originaire de Mariupol, peinent à trouver un emploi pour subvenir à leurs besoins dans un contexte de crise économique. Après deux années de guerre, les organisations humanitaires ont recueilli pléthore d’histoires de vies brisées. 

Depuis mars 2022, la population ukrainienne fait face à des niveaux accrus de pauvreté et de dépendance à l’égard de l’aide. 65 % des ménages ukrainiens ont vu leurs revenus diminuer et près de 44 % d’entre eux, en dépit d’une aide gouvernementale qui peut atteindre les 3000 hryvnias (environ 73 euros), peinent à satisfaire leurs besoins fondamentaux. Au total, 40% de la population ukrainienne aurait besoin d’une assistance humanitaire.

Les déplacements, la perte d’êtres chers et le manque de moyens de subsistance pèsent sur la santé mentale de la population, en particulier pour les plus vulnérables. Ainsi, un quart de la population ukrainienne souffrirait de diverses formes de troubles mentaux du fait du conflit, une tendance en hausse à mesure que le conflit se prolonge.

Une grande partie des enfants ukrainiens sont privés d’éducation formelle depuis 4 ans, du fait de la pandémie de COVID-19 et de la guerre, ce qui affecte leur développement cognitif et nuit à leur santé mentale. Par ailleurs, les femmes dont les maris ont rejoint les rangs de l’armée se retrouvent seules pour prendre soin des membres de leur foyer et elles ne sont pas toujours en mesure de générer les ressources suffisantes pour répondre aux besoins de tous. La mise en place d’une assistance psychologique et psychosociale, notamment à destination des enfants, des adolescents et des personnes aidantes, demeure une priorité programmatique pour Action contre la Faim (ACF).

Pour certains, l’aide humanitaire a été déterminante pour dépasser les difficultés liées à la guerre. En bénéficiant d’un accompagnement psychologique, Natalia a surmonté la perte de son père et les traumatismes liés au conflit. Maksim estime avoir grandi et regagné confiance en lui grâce aux séances de soutien psychologique et psychosocial pour adolescents dispensées dans un centre d’hébergement collectif à Dnipro. Nadiya et son mari, sans emploi du fait la fermeture de l’école de leur village, ont bénéficié d’un soutien financier qui leur a permis de joindre les deux bouts.

En 2023, en réponse à la destruction d’infrastructures essentielles à la survie des populations, Action contre la Faim a renforcé sa collaboration avec des organisations ukrainiennes qui partagent ses valeurs et ses principes d’intervention.

Suite à la destruction du barrage Nova Kakhovka, nous avons fourni des repas chauds aux personnes affectées par les inondations, en partenariat avec l’association World to Ukrainian, dans la région de Mykolaiv. En amont du barrage, à Pokrov, nous avons distribué 95 500 bouteilles d’eau, soit 573 000 litres, pour les 52 000 habitants de la communauté, en coordination avec des partenaires humanitaires et les autorités locales de gestion de l’eau (Vodokanals). En outre, la fourniture d’hypochlorite de sodium et de charbon actif a permis de soutenir la réactivation de l’usine de traitement de l’eau potable de Pokrov.

Même si l’infrastructure d’eau et d’assainissement était déjà vieillissante avant le 24 février 2022, les dommages de guerre ont accéléré sa détérioration. Afin de garantir l’accès à l’eau potable pour la population, en lien avec les Vodokanals, Action contre la Faim finance l’achat de matériel et de produits qui interviennent dans le traitement de l’eau.

Au total, depuis mars 2022, Action contre la Faim a fourni une aide humanitaire à 960 000 personnes à travers l’Ukraine. Nos opérations visent à renforcer la sécurité alimentaire, en particulier pour les personnes déplacées et vulnérables, à faciliter l’accès aux soins de santé primaires et au soutien psychologique, ainsi qu’à garantir l’accès à l’eau, à l’hygiène et à l’assainissement.

Signe que le conflit s’enlise, la ligne de front est restée stable depuis la contre-offensive ukrainienne de juin 2023 et la mobilisation militaire continue. En 2024, la situation humanitaire pourrait encore se détériorer et de nombreux ukrainiens pourraient être à nouveau amenés à tout quitter pour sauver leur vie.

Par ailleurs, l’élan de solidarité qui a suivi le 24 février 2022 montre des signes de faiblesse à mesure que le conflit s’enlise et que d’autres crises modifient les orientations de l’aide internationale. En décembre 2023, les Nations unies estimaient que 3,9 milliards de dollars étaient requis pour le déploiement d’une aide humanitaire adaptée, or environ 60% de l’appel a été financé.

La guerre n’est pas terminée ; les besoins continuent à croître et les services publics ne parviennent pas à faire face seuls. Tenir compte de l’ampleur des besoins et maintenir les financements sur le long terme est donc essentiel pour que les organisations humanitaires puissent continuer à fournir une aide efficace dans la durée.