Faire un don

Votre navigateur internet n'est pas à jour.

Si vous souhaitez visionnez correctement le site d'Action contre la Faim, mettez à jour votre navigateur.
Trouvez la liste des dernières versions des navigateurs pris en charge ci-dessous.

Nigéria © Sébastien Duijndam pour Action contre la Faim

En Immersion

Nigéria

L’ACTION HUMANITAIRE EN CONTEXTE SÉCURITAIRE FRAGILE

 

Cela s’est passé à 20 kilomètres de Maiduguri, chef-lieu de l’état du Borno dans le nord-est du pays, où je me rends le lendemain pour documenter le travail de nos collègues sur le terrain durant deux semaines. Dimanche. Je suis à Maiduguri. Nouvelles informations. Deux morts et plusieurs blessés dans trois villages proches de la ville. Les insurgés ont pillé les habitations et volé les vivres avant de mettre le feu à toutes les maisons.

Le conflit au quotidien

Jour après jour, les informations macabres défilent. Ici le conflit se vit au quotidien, main dans la main avec la faim. Près de 2 millions de personnes ont été déplacées dans les trois États de Borno, Yobe et Adawama. Elles se sont réfugiés dans des camps formels ou informels et parmi les populations hôtes.

Neuf ans après le début du conflit, les Nations Unies estiment que 27 000 personnes ont trouvé la mort et que plus de 800 000 personnes vivent toujours dans des zones inaccessibles. Le conflit en cours prive la population de moyens de subsistance et d’aide vitale, ce qui aggrave le bilan de la malnutrition chez les plus vulnérables. Près de 2,9 millions de personnes vivent dans l’insécurité alimentaire sévère et 440 000 enfants souffrent de malnutrition aiguë sévère.

"Borno devient un environnement à haut risque pour les travailleurs humanitaires. "
Ahmed
Chargé de la sécurité, Nigéria

Intervenir malgré l’insécurité

Petit matin à Maiduguri ; la journée commence comme d’habitude par une réunion animée par le coordinateur régional, Anthony, et son collègue chargé de la sécurité, Ahmed. Une cinquantaine de personnes sont réunies dans la salle. Attentives, elles écoutent ces informations qui décideront peut-être de la teneur de leur journée et in fine, de celle des personnes auxquelles elles viennent en aide.

Attaques dans un camp de déplacés dans les alentours de la ville, rumeurs de planification de violences dans la ville de Monguno où nous intervenons, personnes arrêtées avec des dispositifs explosifs, incidents aux checkpoints… Ahmed égrène les faits, demande si certains ont des informations complémentaires et rappelle que « ce point de situation sécurité, ce n’est pas pour partager des histoires. En aucun cas, vous ne devez autoriser les procédures de sécurité à devenir ennuyeuses pour vous. Borno devient un environnement à haut risque pour les travailleurs humanitaires. »

Alors que certains de mes collègues se préparent à partir pour Monguno, à 140 km de Maiduguri, Anthony m’informe que la décision est irrévocable ; je ne peux les rejoindre en raison des derniers événements et de la détérioration du contexte sécuritaire. Mi-octobre, deux travailleuses humanitaires de la Croix-Rouge internationale enlevées par des groupes d’opposition armés ont été exécutées. Combinées aux dernières informations recueillies qui semblent confirmer une recrudescence des violences, la mission préfère annuler le déplacement.

Au-delà de la frustration, se pose la question d’agir dans un contexte où les travailleurs humanitaires sont menacés à cause du travail que nous faisons et de l’aide que nous fournissons aux communautés vulnérables. En quelque sorte, je peux m’estimer chanceuse ; mes visites sur le terrain sont de courte durée et soigneusement supervisées. En tant que chargée de communication, je ne suis pas ce qu’on appelle un élément « vital » :  je ne sauve pas de vies, je n’ai pas de raison de repousser les limites pour arriver à un endroit. Mais pour certains de mes collègues, baisser les bras signifie parfois mettre en danger la vie des autres, ceux qui dépendent de l’aide.

Nigéria © Sébastien Duijndam pour Action contre la Faim

Nigéria

© Sébastien Duijndam pour Action contre la Faim

Nigéria © Sébastien Duijndam pour Action contre la Faim

Nigéria

© Sébastien Duijndam pour Action contre la Faim

Nigéria © Sébastien Duijndam pour Action contre la Faim

Nigéria

© Sébastien Duijndam pour Action contre la Faim

1/3

ACCÉDER aux zones les plus reculées

Monguno, cette ville de garnison entourée de tranchées, est protégée par l’armée. Il y a deux façons d’atteindre la ville : par la route et ses multiples points de contrôle pour lesquels mes collègues doivent soumettre chaque semaine une demande d’autorisation de voyage aux autorités et qui les exposent à des attaques, ou par l’hélicoptère des Nations Unies aux places limitées.

Sur place, les conditions d’intervention sont précaires : il n’y a plus de réseau cellulaire et nos équipes communiquent grâce aux radios HF. L’importation de produits de base tels que le carburant, les produits pharmaceutiques et les engrais est également très compliquée, ce qui accroît la charge pesant sur les négociants, les coûts de transport et, ce faisant, les prix du marché, constituant un obstacle à toute reprise. En parallèle, les besoins des populations sont énormes. Monguno est rapidement devenu un lieu de refuge pour les personnes fuyant les attaques des groupes armés non étatiques. Aujourd’hui encore, certains arrivent de zones toujours inaccessibles aux acteurs humanitaires.

Anthony est le coordinateur d’Action contre la faim à Borno. Il partage son expérience : « Je me souviens d’une de mes visites sur le terrain à Monguno. J’ai eu l’occasion de parler avec l’une de nos mobilisatrices communautaires, qui a clairement exprimé les besoins criants d’un enfant de 24 mois qui souffrait de malnutrition. Il revenait tout juste d’une région récemment passée sous le contrôle de l’armée nigériane. Cet enfant avait besoin de nourriture de base. »

Se procurer de la nourriture n’est pas facile. Monguno siège dans une zone rurale, où la majorité de la population vit de l’agriculture. Avec le conflit et les mesures de sécurité mises en place par l’armée, les gens ne peuvent pas cultiver à plus de 5 km de la ville. Dans ces conditions, il est presque impossible de subvenir aux besoins de sa famille, que ce soit pour sa consommation personnelle ou pour la vente de produits.

Les stratégies d’intervention doivent être conçues en fonction des contraintes du terrain afin d’atteindre les personnes vulnérables de la manière la plus efficace. « Nous avons mis en place un soutien monétaire pour 11 890 familles à Monguno. Ils reçoivent 25 000 nairas par mois, soit la quantité estimée d’un panier alimentaire moyen. Ce soutien prend la forme de bons alimentaires qui permettent aux gens de se procurer de la nourriture auprès de vendeurs spécifiques qui sont en mesure d’importer de la nourriture dans la ville par leurs propres moyens et qui répondent aux critères de sélection en termes de redevabilité« . Explique Titus, responsable de la sécurité alimentaire et des moyens d’existence pour Borno.

« À propos de cet enfant, reprend Anthony, en entendant son histoire, comment Action contre la Faim a réussi à changer sa vie, je pense qu’en tant qu’organisation, une fois que nous aurons investi plus de temps et de ressources, nous pourrons atteindre plus de personnes et donner une chance et un avenir à ces enfants qui ont été affectés par ce conflit. Et ils pourront être les enseignant-e-s, les médecins et les infirmièr-e-s de demain au Nigeria. »


Malgré les problèmes de sécurité et d’accès, nous avons pu aider plus de 4,8 millions de personnes en 2017 à travers de l’aide humanitaire et de développement. Nous soutenons les personnes déplacées et les communautés d’accueil afin de développer de nouvelles ressources par des transferts monétaires, mais aussi de lutter contre la malnutrition par des activités dans les domaines de la nutrition, de la sécurité alimentaire et des moyens d’existence, de l’eau, de l’assainissement et de l’hygiène. 

Restez informés de nos dernières nouvelles