Sabine Rouhier est de retour de Madagascar où elle a suivi l’évolution de NUTRIS, projet innovant visant à lutter durablement contre les ravages de la sous-nutrition en renforçant les systèmes de santé et en améliorant l’environnement sanitaire et l’accès aux soins des populations. NUTRIS se déroule en 3 phases, sur 3 ans et dans 3 pays, à Madagascar, au Tchad et à Djibouti. Il est financé par l’Agence Française de Développement. Sabine Rouhier nous raconte l’avancement du projet et le rôle de la société civile locale dans la lutte contre la sous-nutrition.
- Où en est le projet NUTRIS ?
La première phase du projet, celle du diagnostic et des recommandations, se termine, un an après son lancement. Son but est de faire un état des lieux de la situation avant le lancement d’actions concrètes et d’impliquer la société civile locale dans le projet et sur le long terme. Les malgaches se sont lancés dans l’état des lieux du système de santé et des conditions dans lesquelles vivent les populations. Ils vont ensuite partager leurs résultats et formuler des recommandations pour améliorer la situation des populations. Cela leur permettra d’avoir accès à des soins de santé de qualité et de vivre dans des conditions saines.
- Comment comptez-vous lutter contre la sous-nutrition ?
Pour lutter durablement contre la sous-nutrition, les populations doivent avoir accès à des soins de santé de qualité et vivre dans des conditions sanitaires décentes. La sous-nutrition est une maladie qui doit être guérie dans un environnement sain. Le projet vise à renforcer l’accès à un système de santé de qualité, aux hôpitaux, aux médecins, et aux pharmacies. Il entend également améliorer l’accès des populations à l’eau et au traitement des eaux usées. Les acteurs locaux vont ainsi améliorer leurs capacités d’influence et d’action pour orienter les politiques nationales vers un accès à la nourriture pour tous.
J’ai assisté à des ateliers réunissant les acteurs locaux, les membres des réseaux constitués, dans la capitale, Tananarive et dans le district de Tuléar. Les malgaches ont livré les conclusions de leur travail sur le financement de la nutrition par l’Etat. J’ai eu l’opportunité de former plusieurs représentants d’ associations, d’ entreprises, de médias et de syndicats aux techniques qu’ils peuvent utiliser pour interpeller au mieux les hommes politiques, les chefs d’entreprises et l’opinion publique. Leur mobilisation encourage des décisions favorables à la lutte contre la sous-nutrition. Grâce à cette formation, les revendications des acteurs locaux seront mieux entendues.
- Pourquoi est-ce important d’impliquer les malgaches dans le projet ?
Les ONG locales, les associations, les fondations, les entreprises, les syndicats, les communautés religieuses et les médias participent directement à la vie locale. Les impliquer est indispensable pour mettre en place une action durable et adaptée au contexte du pays. Les acteurs locaux et nos partenaires, comme ASOS à Madagascar, apportent leurs connaissances des populations malgaches. Ils ont un accès local privilégié. En échange, Action contre la Faim apporte ses connaissances techniques de la sous-nutrition, de l’eau et l’assainissement. C’est un échange de compétences pour mener à bien un projet positif pour les communautés. Intégrer la société civile dans un projet tel que NUTRIS permet aussi de faire prendre conscience aux populations de leur rôle dans l’amélioration de leurs conditions de vie. Ils réalisent qu’en se regroupant en réseaux, ils peuvent faire changer les choses. Ainsi, les malgaches ont décidé d’encourager le gouvernement à investir dans la lutte contre la sous-nutrition dans le pays. Avec les outils adéquats, les acteurs locaux vont tout faire pour atteindre leurs objectifs et que la nutrition soit une priorité pour l’Etat.
- Quelles sont les prochaines étapes du projet ?
L’état des lieux sur le système de santé et les conditions sanitaires des populations est bientôt terminé à Madagascar. Les acteurs locaux vont mettre en place une stratégie et une liste d’actions concrètes à réaliser. Une fois mises en place, les familles auront accès à un assainissement de qualité, à l’eau potable et à un système de santé amélioré. C’est ainsi que certains comportements entreront dans leurs habitudes : besoin d’avoir des toilettes familiales ou de réhabiliter des pompes manuelles, avoir accès à des services de vidange hygiénique, connaitre les techniques de traitement de l’eau à domicile… A Madagascar, le but est aujourd’hui d’inscrire les priorités de lutte contre la sous-nutrition dans le plan national validé au mois de septembre. Enfin, au mois de mai 2016, les représentants de 11 pays d’Afrique se réuniront à Dakar, au Sénégal, pour partager leurs connaissances sur l’analyse du budget des Etats dans les domaines de la santé et de la nutrition.
Une fois ces actions terminées, la troisième étape du projet amènera à partager les connaissances créées et les solutions identifiées et expérimentées tout au long du projet avec d’autres régions ou d’autres pays.