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Témoignages

"Ici, ce n’est pas facile de travailler, on se fait souvent exploiter"

Kitim est une petite ville en pleine expansion. L’arrivée des réfugiés syriens y a provoqué de profondes modifications. De nombreux Jordaniens ont profité de cet afflux pour louer des habitations aux nouveaux-venus et ont pu ainsi s’enrichir. D’autres vivent les mêmes difficultés que les Syriens : leur niveau de vie a baissé, les emplois sont plus difficiles à obtenir.

C’est à proximité de maisons en construction qu’Ahmed vient nous chercher. Mahmoud, son frère aîné rencontré quelques jours plus tôt, lui a donné nos coordonnées. Il nous guide à travers les ruelles pentues de Kitim, que le chauffeur négocie non sans peine. La voiture s’arrête devant un portail en fer blanc qui donne sur une petite allée. Au bout de cette dernière, des enfants nous regardent, curieux, à l’ombre des oliviers puis courent se cacher dans les jupons maternels. La mère de famille, Selma, et une de ses amies, nous accueillent sur le palier de la porte.

 

Samia, une des filles d’Ahmed © Florian Seriex pour Action contre la Faim
Ahmed et ses enfants © Florian Seriex pour Action contre la Faim
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Nous prenons tous place dans une vaste pièce. Aux murs, les gribouillages des enfants donnent un peu de fantaisie à l’ensemble grisâtre. Les deux femmes s’installent d’un côté avec les sept enfants. De l’autre, l’équipe d’ACF et au milieu de la pièce, Ahmed qui s’assoit en tailleur face au téléviseur.

La conversation commence mal et l’ambiance est pesante. Les deux femmes émettent de nombreuses critiques à l’encontre des ONG. « Vous n’êtes pas les premiers à venir chez nous, à recueillir nos témoignages, et comme les autres, vous allez partir et ne jamais donner de nouvelles ».  Le manque d’informations et les besoins de plus en plus importants rendent leur situation tendue.

Après quelques minutes, Selma nous parle de l’arrivée en Jordanie : la fuite de Daraa en août 2012, la prise en charge par l’armée jordanienne qui les mène au camp King Abdullah. Là, c’est le dénuement, un sentiment d’humiliation dans des conditions de vie précaires. Très vite, plusieurs des enfants tombent malades, l’aide médicale espérée n’est pas au rendez-vous et la famille fuit le camp, direction Kitim où des proches sont déjà installés.

Les visages sont tendus, on les imagine se remémorant ce jour où ils sont devenus des réfugiés. Près de leur mère, deux petites filles coiffent inlassablement leurs poupées aux longs cheveux blonds. A l’instar du plus jeune fils, elles sont toutes deux malentendantes. Si les trois enfants disposent de sonotones, les appareils fonctionnent mal et n’ont pu être réparés, faute de moyen.

Ahmed, dont le regard était resté figé depuis le début de l’entretien prend soudainement la parole lorsque nous abordons les questions financières. « Ici, ce n’est pas facile de travailler, on se fait souvent exploiter et on gagne bien moins qu’un Jordanien. Pour les loyers c’est pareil, un Jordanien payait 80 JD (un peu plus de 80 euros), pour cette maison, nous c’est 150 JD ! ».

Un garçon d’une douzaine d’année, arborant un maillot du Milan AC, entre dans la maison. Son père, un cousin d’Ahmed, a eu vent de notre présence et souhaite nous rencontrer à son tour. Dans le dos du garçon se cache une fillette, sa petite sœur autiste, qui nous fait de grands sourires.

Salim © Florian Seriex pour Action contre la Faim
Samer et ses enfants, Basel, Nouria et Salim © Florian Seriex pour Action contre la Faim
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Chaque jour, Samer cherche des petits boulots : gardien, jardinier, il multiplie les pistes lui qui était chauffeur sur les marchés à Daraa. Habitué à notre présence, il finit par nous raconter leurs dernières semaines chez eux : « les militaires ont attaqué cinq fois. Durant la dernière offensive, il y a une quarantaine de tanks, c’était effrayant. La maison de nos voisins a été complètement détruite, nous avons décidé de partir ». Pourtant, même s’ils ne sont pas en danger en Jordanie, Samer n’attend qu’une seule chose, pouvoir retourner chez lui et retrouver sa vie d’avant.


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