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Témoignages

Rencontre avec Pierre Tripon, Chef de mission en Haïti pour Action Contre la Faim

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Quand êtes-vous rentré d’Haïti ?

Je suis rentré d’Haïti il y a quelques jours. Je m’y étais rendu dès le lendemain du séisme, et j’y retourne demain !

Sept semaines après la catastrophe, quelles sont les priorités en Haïti ?

Pour le moment, l’urgence se situe au niveau du logement. Un million de personnes sont sans-abris sur l’île, et pour l’instant seuls 20% d’entre eux ont pu recevoir un abri. Le temps presse, d’autant plus que les pluies sont quasi quotidiennes. La saison des pluies commence vraiment dans deux semaines, et la saison des cyclones démarre en juin. Il nous reste ainsi 2 semaines pour couvrir l’ensemble des besoins, ce qui sera quasiment impossible.

 

Cela ne doit pas arranger la situation de l’assainissement

En effet, les pluies ajoutées à la concentration de la population et à la présence de débris aggravent la situation. Mais nous nous concentrons sur ce problème, et Action contre la Faim a déjà installé plus de 600 latrines à Port-au-Prince, des stations de lavage de mains, et des équipes passent tous les jours dans les camps pour promouvoir l’hygiène.

 

Où en sommes-nous au niveau des besoins alimentaires ?

Aujourd’hui, les besoins alimentaires sont à peu près couverts. Avec Action contre la Faim, nous avons pu distribuer de la nourriture à près de 15 000 familles, soit 75 000 personnes. Sachant que nous effectuons des actions principalement ciblées sur les enfants en bas-âge.

Et les besoins en eau ?

La question de l’eau potable a été prise en compte quelques jours après le séisme. Action contre la Faim apporte de l’eau à 70 000 personnes, et a installé des points d’eau dans toute la ville, en comptant en moyenne 10 Litres d’eau par personnes. On peut dire qu’aujourd’hui ce n’est plus un problème.

 

Vous parlez des enfants en bas-âge, justement quelles sont vos actions d’eux ?

Il est essentiel de se préoccuper de la nutrition des enfants de moins de cinq ans, car ce sont les plus fragiles. D’autant plus que pour des raisons de croyance selon lesquelles le lait maternel serait mauvais pour l’enfant en temps de crise, certaines mères préfèrent donner du lait en poudre à leurs enfants, ce qui est très dangereux dans un environnement sanitaire difficile. Action contre la Faim a donc installé une dizaine de tentes « maman-bébé » afin de promouvoir l’allaitement en situation de crise.

 

Apportez-vous également un soutien psychologique à ces familles ?

Effectivement, nous développons un soutien psychologique pour les personnes qui ont vécu un traumatisme fort, en essayant plus spécifiquement de toucher les mères et les jeunes enfants. Par exemple, nous avons organisé des séances en groupe, de vingt personnes, en leur faisant « rejouer » la scène du séisme. Nous nous sommes rendus compte que la majorité des habitants ne parlaient pas de ce qu’ils avaient vécu entre eux. C’est pourquoi, en séance individuelle ou collective, le but est que les personnes extériorisent leur traumatisme.

 

Economiquement, Haïti est dans une situation grave, avez-vous prévu des programmes de relance économique ?

Oui, depuis deux semaines, Action contre la Faim a mis en place un programme intitulé « Cash for Work » soit « Argent contre Travail », qui vise à employer des personnes vulnérables sur place pour réaliser des travaux d’intérêt communautaire, comme par exemple participer au nettoyage de la ville. Cela permet d’apporter une source de revenu aux familles, et ainsi de participer à la relance économique du pays. 10 000 familles seront aidées grâce à ce projet.

 

Et sur quels critères embauchez-vous ces personnes ?

Ces personnes sont sélectionnées selon des critères de vulnérabilité : une personne par famille afin de toucher le plus de familles possible, nous choisissons aussi généralement des familles nombreuses, ayant à charge des enfants handicapés, ou des familles monoparentales. Il faut que ces personnes soient aptes à travailler et volontaires.

 

Et justement, avez-vous des programmes pour les personnes n’étant pas aptes à travailler ?

Oui nous aidons également les familles en grande difficulté, et qui auront du mal à retrouver un emploi, comme les personnes trop âgées, ou les personnes mutilées. Il s’agit d’une aide financière.

 

Quelles sont les difficultés rencontrées sur place pour la mise en oeuvre des programmes ?

Les difficultés rencontrées sont multiples. Pour en nommer quelques unes, nous avons du faire face les premiers jours au fatalisme des populations qui craignaient d’autres catastrophes. Elles n’étaient alors pas dans l’idée de s’en sortir.

Une des difficultés sur place, a également été de parvenir à se coordonner avec les différentes parties prenantes. Car pour qu’une aide soit efficace il faut qu’elle soit coordonnée. Or, l’intégration du gouvernement local, entre autre, dans les projets a été difficile. Cela peut notamment s’expliquer par un problème de communication, car il n’avait plus d’accès à internet alors que les organisations sur place communiquent principalement via cet outil. Et pour terminer, il est également extrêmement complexe d’intervenir dans une zone urbaine aussi densément peuplée, car nous manquons de place pour le déploiement des activités et pour le relogement à moyen terme des sinistrés, sachant qu’en Haïti tous les terrains sont privés.

 

Enfin, quelles sont vos perspectives quant à la mise en place de la reconstruction ?

Actuellement, nous aidons déjà autour de 100 000 personnes et nous continuons chaque jour à augmenter nos activités. Nous sommes toujours dans une phase d’urgence. Mais nous sommes en Haïti depuis 1985, et nous ne comptons pas partir dès que la période de crise sera levée. Nous mettrons en place des programmes post-crise.

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