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Témoignages
Johaira est mère de 6 enfants, à 27 ans ils ont déjà connu une guerre et la faim*. Elle a dû fuir sa ville natale, Marawi dans les Philippines et raconte son combat contre la sous-nutrition. Les groupes armés ont assiégé la ville de Marawi pendant 5 mois. Des centaines de milliers d’habitants ont dû fuir une des grandes villes de la zone, laissant derrière eux leur maison, leur sécurité et leur travail.
Les bombes ne choisissent pas leurs victimes qu’elles soient civiles ou ennemies. C’est pour cela que nous avons décidé de partir. Nous marchions sur les petites routes secondaires car la guerre s’intensifiait et les voies principales n’étaient plus sûres. Une pluie de bombes s’est abattue sur la ville. Une des explosions a détruit une mosquée et deux de mes neveux ont été touchés.
Nous sommes partis nous réfugier chez mes parents à Pantar. Une fois arrivés chez eux nous étions enfin en sécurité mais nous avions des difficultés à obtenir des kits d’urgence distribués par le gouvernement et les organisations humanitaires. Ils les distribuaient dans les centres d’évacuations aux déplacés du conflit, mais ma mère avait refusé que l’on aille dans un centre elle préférait que l’on reste chez elle. Nous avons reçu que du riz, c’est tout ce que l’on a mangé pendant 8 mois. Cette période a été très dure pour nous.
En octobre 2017, la fin de la guerre est enfin arrivée et en janvier nous avons pu rentrer chez nous. Quand nous sommes arrivés, tout avait été saccagé. Avec mon mari nous avions perdu notre seule source de revenu. Avant la guerre, nous étions agriculteurs mais avec la guerre la ville de Marawi a été détruite et il n’y a plus de marché où vendre nos produits. La ville d’Illigan est la plus proche mais pour vendre nos produits là-bas nous devrions dépenser plus d’argent pour y aller que ce que nous pouvons gagner en vendant nos produits. Chaque jour il est de plus en plus difficile de survivre sans revenu.
Mes enfants demandent à manger, ils pleurent constamment parce qu’ils ont faim, mais nous n’avons rien à leur donner. Maintenant, ils sont toujours malades, comme les autres enfants du quartier. Le premier était mon fils Rahim, il pleurait tout le temps et il avait des taches rouges sur la peau. Il n’arrêtait pas de pleurer et dormir, je m’inquiétais car il dormait beaucoup trop. J’ai trop dormi et cela m’inquiétait aussi. Parfois, je le réveillais juste pour voir s’il était encore en vie, puis les pleurs recommençaient. J’ai essayé de l’allaiter, mais il ne voulait pas. Il ne comprenait pas ce qui lui arrivait. Ma mère m’a conseillé de l’emmener à l’hôpital, mais nous n’avions pas d’argent, comment allions-nous payer les factures et les médicaments prescrits par les médecins ?
Un jour, nous sommes allés à Bliss, près de Medina. Une équipe de l’Action contre la Faim dépistait la malnutrition chez les enfants de moins de cinq ans. J’ai amené mes enfants pour qu’ils puissent être examinés. C’est là que nous avons rencontré Jonathan, qui a pris les mesures de mes trois plus petits.
Il m’a annoncé que les jumeaux souffraient de malnutrition aiguë et la petite de malnutrition modérée. comment ne pourraient-ils pas être malades si nous ne mangeons que du riz cuit depuis des mois ? Ils nous ont donné des sachets de pâte d’arachide (Pumply Nut) et nous ont dit comment nous devions les utiliser. Action contre la Faim est revenu après une semaine, ils ont constaté que les jumeaux prenaient du poids et étaient beaucoup plus actifs. J’étais si heureuse de voir mes enfants se rétablir…. Maintenant, ma fille Sarah est en traitement.
J’aimerais retrouver ma vie d’avant et gagner assez d’argent pour que ma famille soit en bonne santé. J’aimerai pouvoir cultiver des champs et voir la vie revenir dans la ville de Marawi.
*Témoignage recueilli en 2018, un an après le siège de Marawi.
Philippines
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