Fortification alimentaire : recommandations opérationnelles d’Action contre la Faim

QU’EST-CE QUE LA FORTIFICATION ALIMENTAIRE ?

Les Principes directeurs de l’OMS et de la FAO sur la fortification alimentaire1 définissent la fortification des aliments comme “l’action qui consiste à augmenter délibérément la teneur d’un aliment en un micronutri-ment essentiel (vitamines et minéraux, y compris oligo-éléments), de façon à améliorer la qualité nutritionnelle de l’alimentation et à apporter un bénéfice sur le plan de la santé publique avec un risque minimal pour la santé.”

DIFFÉRENTS TYPES DE FORTIFICATION ALIMENTAIRE

• Fortification de masse : fortification des aliments largement consommés par la population en générale, elle s’applique surtout aux denrées de base.
• Fortification ciblée : fortification d’aliments destinés à des sous-groupes de population, comme les aliments complémentaires pour nourrissons.
• Fortification des aliments dans un but commercial : le fabricant de produits alimentaires prend l’initiative d’ajouter un ou plusieurs micronutriments aux aliments dans le but de répondre à ou de créer un besoin sur le marché.
• Fortification à domicile : fortification au niveau du ménage ou de la communauté.

POURQUOI LE MONDE HUMANITAIRE S’INTÉRESSE-T-IL DE PLUS EN PLUS AUX ALIMENTS FORTIFIÉS ?

En 2017, la faim dans le monde a augmenté pour la première fois en dix ans, atteignant 815 millions de personnes souffrant de la faim2, soit une augmentation de 38 millions par rapport à 2016. Alors que 155 millions d’enfants de moins de 5 ans souffrent d’un retard de croissance, causé par une mauvaise nutrition, les niveaux de carences alimentaires en micronutriments sont alarmants : 2 milliards de personnes souffrent de carences en micronutriments, également connues sous le nom de “ faim cachée3 ”.

Dans un contexte caractérisé par une baisse des financements publics pour la nutrition, par un défaut de redevabilité des États donateurs face aux engagements pris, des alternatives doivent être envisagées pour améliorer le financement de la lutte contre la faim. Les organisations nationales et internationales de la santé mettent l’accent, de manière croissante, sur les programmes de fortification en micronutriments, comme une voie prometteuse pour remédier aux carences dans les pays à faibles et moyens revenus.

Ces programmes sont à présent fortement promus par les donateurs compte tenu du fait qu’ils sont l’opportunité d’impliquer plus aisément les entreprises du secteur privé dans la lutte contre la faim. Les acteurs privés impliqués dans l’agriculture et la nutrition, quant à eux, soutiennent le fort potentiel de la fortification des aliments, comme la voie pour améliorer le régime alimentaire des populations vulnérables aux carences alimentaires.

LE POINT DE VUE D’ACF SUR LA FORTIFICATION DES ALIMENTS

Action contre la Faim estime que les preuves scientifiques sont actuellement insuffisantes pour démon-trer les effets positifs de la fortification des aliments sur le long terme. Par ailleurs, la stabilité et la bio-disponibilité des nutriments ajoutés ainsi que leurs propriétés physiques et culinaires sont de plus en plus remises en question. À cela s’ajoute la contrainte du coût car ces aliments fortifiés ne sont pas acces-sibles aux populations vulnérables et pauvres, et compromettent l’accès à la diversification alimentaire, via les marchés.

Enfin, la fortification peut être perçue comme une menace pour l’environnement local et la culture alimentaire locale : elle remettrait en cause les schémas alimentaires fondés sur des aliments frais et peu transformés et pourrait ainsi amener les populations à penser que les denrées alimentaires naturelles sont pauvres en nutriments et doivent être améliorées par le biais de la fortification afin d’être effectivement nutritives.

Alors que la promotion de la fortification figure actuellement parmi les priorités des donateurs et des Nations Unies, ACF reste prudent dans ses approches opérationnelles. Ces recommandations opération-nelles sur la fortification alimentaire reflète ces précautions ; elles visent à garantir qu’ACF se positionne en faveur de la solution la plus sûre pour lutter contre la faim, malgré l’agenda politique en cours