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À la Une

Sierra Leone

« Stopper le virus Ebola à notre manière »

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Durant la période de mai à octobre 2014, des messages de sensibilisation ont été diffusés pour expliquer les signes et les symptômes du virus Ébola, et les précautions à prendre en cas d’infection ou de contact avec un malade. Cependant, peu de changements dans les comportements ont été constatés au niveau des communautés. Par méconnaissance ou par manque d’information sur les modes opératoires des ONG, la résistance communautaire à la réponse humanitaire d’urgence s’est amplifiée.

Dans le district de Moyamba, où Action contre la Faim intervient depuis 2009, les équipes se sont engagées dès le début de l’épidémie dans des activités de mobilisation sociale afin de permettre aux familles de se protéger contre le virus, notamment grâce à des kits d’hygiène. Face aux réticences grandissantes, ACF a adapté son approche en impliquant les communautés dans la prévention de l’épidémie, en tant qu’acteurs principaux.

Pilotée par les communautés elles-mêmes, l’approche CLEME (Community-Led Ebola Management and Eradication) est un projet qui répond aux spécificités de l’épidémie Ebola. Les personnes qui participent au projet sont amenées à identifier elles-mêmes leurs comportements à risque et à proposer des solutions adaptées. Cette approche vise à s’assurer que tous les membres de la communauté sont impliqués dans les activités de prévention de la maladie et contribuent eux-mêmes à développer leur capacité de résilience.

« Nous étions convaincus de la nécessité de mettre en place ce projet » raconte Alhaji Sallu, en charge de la promotion de l’hygiène. « Il a été initialement expérimenté dans les chefferies de Ribbi et de Bagruwa, dans le district de Moyamba. Dans ces régions, les gens avaient certaines connaissances de l’épidémie d’Ébola, mais il y avait toujours des pratiques à risque qui favorisent la propagation rapide de la maladie. »

Le CLEME a permis aux communautés d’identifier et de comprendre les pratiques à risque et ainsi d’adopter des comportements adaptés. Ces mesures ont amené les habitants à construire leurs propres salles d’isolation pour éviter les risques de contamination. Des stations de lavage des mains ont également été mises en place dans tous les foyers, ainsi qu’un comité de surveillance. « J’étais très effrayé au départ parce que je mesurais très bien les risques que je prenais en travaillant dans les communautés. Nous avons réussi à déclencher un changement de comportement auprès des gens, ce qui a permis une baisse des cas de contamination » déclare Alhaji Sallu.

 

« Nous avons décidé de prendre nous-mêmes les choses en main, au lieu d’attendre l’aide extérieure »

 

Les Sierra-Leonais qui vivent en dehors de Freetown, la capitale du pays, ont fait face à d’énormes difficultés pour contenir l’épidémie d’Ebola. Ils vivent pour la majorité dans des districts pauvres, où les rites et traditions funéraires restent densément pratiqués. Avec un impact majeur sur la propagation de l’épidémie.

Ibrahim Karbo est un agriculteur de 42 ans qui vit dans la chefferie de Ribbi, dans le district de Moyamba, l’un des plus affectés par le virus Ébola. La plupart des maisons de son village ont été mises en quarantaine au pic de l’épidémie, et de nombreuses personnes sont mortes dans ce qui ressemblait alors à une épidémie sans fin. Au-delà du risque de transmission, les enjeux portaient également sur les moyens de subsistance. En effet, non seulement les agriculteurs ne cultivaient plus, mais les marchés étaient interdits par mesure de sécurité et de prévention, dans le cadre de l’état d’urgence décrété en Sierra Leone à ce moment-là. Comment alors, par exemple, fournir des repas quotidiens aux personnes en quarantaine ?

 

En avril, Ibrahim a été recruté pour participer à la mise en place de l’approche CLEME dans sa communauté. Celle-ci a été sélectionnée car elle faisait partie des villages à haut risque de contamination et de récidive. Ibrahim a remarqué que les sessions de sensibilisation ont permis à la population d’accéder aux informations essentielles sur le virus Ébola, les modes de transmission et les moyens de prévention. « Nous avons décidé de prendre nous-mêmes les choses en main, au lieu d’attendre l’aide extérieure. Nous avons mis sur pied un système grâce auquel nous étions alertés lorsqu’une personne ressentait l’un des symptômes du virus. Celle-ci était alors isolée provisoirement dans un local que nous avons construit, afin qu’elle puisse attendre une ambulance sans contaminer d’autres personnes. Nous avions aménagé des espaces pour les personnes malades, pour des cérémonies de funérailles et pour l’accueil des familles des malades. Un comité a également été constitué pour alerter et informer les autorités régulièrement » explique Ibrahim.

Les cas d’Ébola ont considérablement diminué dans le village d’Ibrahim. Les comportements et les habitudes sanitaires de la communauté ont évolué en intégrant le paramètre Ebola et les risques qui y sont liés.

Au-delà du district de Moyamba, l’approche CLEME a été étendue au district de Kambia, à la frontière avec la Guinée. La Sierra Leone a enregistré depuis le mois de janvier une baisse significative du taux de transmission du virus Ébola, grâce à une amélioration des connaissances sur le virus et des comportements plus adaptés.

 

En quarantaine dans un bidonville de Freetown

 

Le premier cas d’Ebola a été officiellement déclaré dans la capitale sierra leonaise en août 2014. Le virus s’est répandu très rapidement et en moins de cinq mois, la zone urbaine de l’Ouest, où se trouve Freetown, est devenue la plus affectée par l’épidémie. En juin, la zone représentait à elle-seule 26% du nombre total des infections. La propagation a été favorisée par le confinement, ainsi que les conditions sanitaires précaires, en particulier dans les bidonvilles qui ont été les plus touchés par Ebola. Depuis le mois de mai, Action contre la Faim mène des activités de prévention à Freetown. Ces activités ont été intensifiées au pic de l’épidémie.

Sheku, artiste vivant dans le bidonville de Rokupa à Freetown, a été placé en quarantaine suite à la contamination de l’un de ses proches. « Ma famille, ainsi que tous les habitants de cette zone sont vulnérables et exposés à Ebola (…) notre communauté est très pauvre et ne sait pas comment se protéger du virus, ni comment réduire les risques de contamination » souligne-t-il. S’il est primordial de se laver les mains, la population de Freetown avait avant l’épidémie, et a toujours aujourd’hui, d’énormes difficultés d’accès à l’eau. « Deux membres de ma famille sont morts et nos conditions de vie se sont détériorées. Nous n’avions aucun équipement de protection ni d’hygiène. Nos moyens de subsistance ont diminué à cause de l’épidémie » explique Sheku. En cause, l’expansion du virus, et les mesures d’urgence comme la quarantaine, l’interdiction des marchés qui affectent les moyens d’existence des foyers.

Grâce à la mobilisation sociale et la distribution de kits d’hygiène, personne n’a été infecté dans le quartier au terme des 21 jours de quarantaine. « Ces quatre derniers mois, j’ai activement participé à la campagne de lutte contre Ébola. Les conditions d’hygiène se sont considérablement améliorées. Nous sommes à présent sensibilisés aux pratiques d’hygiène nécessaires pour lutter contre le virus Ebola. Tout cela a été possible grâce aux multiples campagnes de sensibilisation, de formation et de discussion sur la prévention de l’épidémie Ébola » conclut Sheku.

 


Photographie © ACF / Alfons Rodriguez

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